Pont-l'Evêque (fromage à pâte molle et croûte lavée) AOC - AOP

Le Pont l'Evêque est un fromage élaboré à partir d’un lait produit par des animaux, de race normande essentiellement et qui pâturent plus de 6 mois par an. C'est un fromage à pâte molle, à caillé malaxé et à égouttage forcé. Il présente des arômes lactés de noisette et parfois de fumé. Sa forme est carrée voire parfois rectangulaire de 3,5 cm de haut, pouvant être présentés sous 4 formats : - le Pont-l''Evêque (105 à 115 mm de côté), - le grand Pont-l'Evêque (190 à 210 mm de côté), - le petit Pont-l'Evêque (90 à 95 mm de côté), - le demi Pont-l'Evêque rectangulaire (110 sur 55 mm de côté). Sa croûte est de couleur jaune doré à jaune orangé voire saumon, striée sur les deux faces à cause des traces des stores lors du moulage. Sa pâte, souple et onctueuse, de couleur jaune crème, est homogène avec quelques ouvertures.

Pont-l'Evêque AOC

MODE DE PRODUCTION

Le lait produit dans la région dispose d’une spécificité conférée par l’autonomie fourragère des exploitations et le recours important au pâturage (au moins 6 mois par an) grâce à la douceur du climat.
La forte disponibilité de surface en herbe ainsi que l’utilisation d’animaux de la race normande, sélectionnée depuis plus d’un siècle dans la région pour ses aptitudes fromagères participent pareillement aux spécificité du produit.

MODE D’ELABORATION
Le Pont-l\’Évêque est fabriqué majoritairement par des fromageries mais aussi par quelques producteurs fermiers.

Préparation du caillé
Il faut 3,5 litres de lait partiellement écrémé, en général thermisé ou pasteurisé mais parfois cru, pour fabriquer un Pont-l\‘Evêque. Le lait subit une ou deux maturations avec ensemencement en ferments lactiques. Mis en bassines à 36°C environ, il est emprésuré avec 30 cl de présure pour 100 litres.
Après la coagulation, le caillé est découpé en petits cubes et brassé. Une partie du lactosérum est soutirée soit par pompage, soit par écoulement gravitaire. Certains producteurs fermiers égouttent le caillé en le malaxant dans une toile pour accentuer l\’égouttage.

Fabrication des fromages
Le moulage du caillé, manuel ou mécanique, est réalisé dans des multimoules munis d\‘une rehausse. L\’égouttage est facilité par plusieurs retournements à une température d\‘environ 22°C. Le premier retournement sert à marquer le fromage. Les fromages sont démoulés 1 à 3 jours après l\’emprésurage et mis sur claie pendant 1 à 2 jours à une température de 15 à 20°C pour la phase de levuration, pendant laquelle ils sont retournés.
La levure de surface, Geotrichum candidum, se développe naturellement ou est ensemencée par pulvérisation. Elle permet la remontée du pH de surface avant que s\’implante le ferment du rouge.

Affinage des fromages
Les fromages sont ensuite salés au sel sec ou en saumure. Suit une phase de ressuyage plus ou moins longue et l\‘affinage à environ 14°C pendant 3 à 4 semaines.
Pendant l\’affinage, les fromages sont retournés et peuvent être soit lavés, soit brossés, soit ne subir aucune intervention. Ils sont le plus souvent disposés à plat mais peuvent être déposés sur la tranche les uns contre les autres.

HISTORIQUE

Une réputation bien acquise
Dès 1662, Hélie Le Cordier célèbre le “pont-l’évesque” , au moyen de quelques vers, parmi lesquels :
“II n’est point d’une odeur mauvaise
Ny d’une plûre qui déplaise,
Des autres il n’a point de fart,
Tout le monde également l’aime,
Car il est fait avec tant d’art,
Que jeune ou vieux, il n’est que cresme.”
A la même époque, l’Abbé Marolles cite le Pont-l’Evêque parmi les “fromages les plus renommés” de France. Sa réputation était donc bien acquise au XVIIe siècle mais certains voient dans un fromage appelé “angelot”, fabriqué dès le XIIIe siècle, l’ancêtre voire une forme primitive, du Pont-l’Evêque.
Pourtant, c’est seulement à partir du XVIe siècle que “l’angelot” est associé à la Normandie en particulier et ses liens avec Pont-l’Evêque ne sont explicites que plus tard. Ainsi, à la fin du XVIIe siècle (1694), Thomas Corneille décrit l’angelot comme une “sorte de petit fromage en cœur, fort gras et fort bon, qu’on fait au pays de Bray en Normandie”.
Pour les auteurs du Dictionnaire de Trévoux (1743-1752), “ce mot [angelot] signifie (…) une espèce de petits fromages qui n’est presque connu qu’en Normandie. On dit les angelots du Pont l’Evêque, les angelots du Pays de Bray.”

Une production et une réputation grandissante
Au XVIIIème Siècle, sa fabrication se développe avec le développement de la mise en herbe du Pays d’Auge qui permet d’augmenter la quantité de lait disponible. L’utilisation de moule en bois permet de lui donner sa forme carrée actuelle.
Au début du XIXe siècle, l’auteur de “L’annuaire du Calvados pour l’An XII” remarque, à propos de la ville de Pont-L’Évêque, “il s’y tient marché deux fois la semaine, lundi et vendredi, et deux foires par an. On estime les fromages de Pont-l’évêque et il s’en fait un assez grand commerce.”
En 1856, Husson nous apprend qu’on vendait annuellement 31200 fromages de Pont-l’Evêque à Paris. Comme il dispose d’une bonne notoriété, les fabricants élargissent leur gamme en diversifiant les qualités selon la teneur en matière grasse du lait mis en œuvre. La première qualité était obtenue à partir du lait entier additionné de crème fleurette. La deuxième provenait du lait de la veille, écrémé, ajouté au lait du matin de la fabrication, le fromage était donc moins gras. La troisième était obtenue uniquement avec du lait écrémé de la veille, le fromage était donc plus acide, moins gras et nécessitait souvent un lavage pour améliorer son aspect extérieur.

Une protection devenue nécessaire
A la fin du XIXème siècle, les fabrications de Pont l’Evêque se développent parallèlement à la sélection de la race normande et à l’amélioration des techniques herbagères. Mais le succès du Pont l’Evêque sera entravé par le formidable développement du Camembert qui mobilisera, aux dépends des autres fromages locaux, le lait produit dans la région.
Le Pont l’Evêque va, au XXème siècle, quitter comme le Camembert, son berceau d’origine du Pays d’Auge. Les producteurs locaux vont toutefois s’organiser pour protéger et valoriser ce fromage.
Cette production, à partir de 1926, fait l’objet d’une garantie syndicale attestée par la présence d’un timbre d’origine représentant une vache sous un pommier et portant en exergue les mots Pays d’Auge. De ce fait, la délocalisation de la production du Pont l’Evêque sera contenue et en 1972 et pourra être reconnu en Appellation d’Origine Contrôlée sur une aire limitée à six départements. Sa production reste encore aujourd’hui majoritairement augeronne.

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