Les Grande et Petites Limagnes

Auvergne

Clermont-Ferrand
Clermont-Ferrand - www.flickr.com/photos/by_irma

Entre la Combraille et les monts Dômes à l’ouest, la Montagne bourbonnaise et le Livradois à l’est, s’ouvre une vertigineuse dépression, formée par l’affaissement du plissement granitique à l’ère tertiaire, comblée par des sédiments lacustres, puis par des alluvions et des poussières granitiques : la Limagne.

Cœur historique de l’Auvergne, la Limagne est un pays peu homogène sur le plan culturel, social et administratif, fondé sur la qualité particulière de son sol, qui s’étire sur 150 kilomètres, du confluent de la Sioule à Langeac et qui concerne trois départements (Allier, Puy-de-Dôme, Haute-Loire).

On distingue la Grande Limagne (Limagne des terres noires entre Lezoux, Billom, Clermont-Ferrand, Riom, Gannat), la Limagne des buttes (au sud d’une ligne Billom-Pont-du-Château-Riom), constituée de tables volcaniques (coulées de lave) et de culots (cheminées remplies de lave), et enfin les Petites Limagnes. À la Grande Limagne, viennent se greffer les Varennes (« mauvaise » Limagne, essentiellement entre vallée de la Dore et val d’Allier) et, au nord, aux abords de la frontière départementale de l’Allier, la Limagne bourbonnaise (voir article sur la Limagne bourbonnaise).

D’un climat ensoleillé et plutôt sec, ces Limagnes qui, globalement, se définissent par des aptitudes agronomiques favorables, se morcellent à nouveau en une succession de pays « gigognes » : Clermontois, Riomois, pays de Volvic, Pays brayaud, pays d’Aigueperse, Gannatois, pays de Lezoux, Comté, Billomois… Au sud, les Petites Limagnes, avec leurs champs plus restreints, moins plantureux, leurs buttes, sont restées plus proches de la tradition polyculturale : Limagne d’Issoire et Limagne de Lembron, flanquées du Pays des Couzes (transition entre massifs volcaniques et plaines), Limagne de Brioude et Limagne de Langeac en constituent les riants maillons dont le patrimoine bâti (vestiges de fortification, châteaux, églises) révèle l’opulence d’hier.

Gastronomie

Cette formidable mosaïque limagnaise engendre une diversité que traduit la gastronomie : charcuterie (jambon sec d’Auvergne, saucisson sec et saucisse sèche d’Auvergne, boudin noir, pâtés, lard), palette aux lentilles1, tripoux d’Auvergne, gigot brayaude, coq au vin auvergnat, potée auvergnate, chou farci, soupe au chou, omelette brayaude, poissons (truite, brochet, sandre, ablette, brème, gardon… saumon de l’Allier) et petite friture (friture de vairons), escargots, champignons sauvages, légumes (dont pomme de terre, chou, échalote, ail rose de Billom) et fruits (pomme), fromages (gaperon), huile de noix.

Pâtisserie : pompe aux pommes (ou aux poires), milliard aux cerises, pachade, brioche de Riom, sacristain (à Saint-Germain-Lembron), croquant d’Auvergne, exquis de Royat.

Friandises : pâtes de fruits d’Auvergne, angélique et fruits confits de Clermont, guignolettes d’Auvergne, chocolats de Royat, praline d’Aigueperse.

Boisson : eau minérale Volvic.

La Grande Limagne (dite Limagne de Clermont) s’ouvre en aval du seuil granitique de Coudes en une large plaine dont la fertilité proverbiale résulte des terres noires (marnes, riches en argiles, potasse, colorées de matières organiques végétales). Les « hauts » y alternent avec les « bas » qui sont souvent d’anciens marais. Ces vagues tranquilles portent des champs rectangulaires en « lames de parquet », blé, orge, maïs, betterave à sucre, colza, tabac. Le vignoble, aujourd’hui résiduel, couvre les pentes. Ces terres noires ne cèdent à la médiocrité des sols caillouteux qu’aux marges du département de l’Allier, par-delà lequel s’affirme la Limagne bourbonnaise, ainsi que dans les Varennes, partie orientale composée de graviers charriés par l’Allier, couverte de forêts. La Grande Limagne, outre la plaine Clermontoise, se distribue entre la Limagne de Riom (où la couche sédimentaire se montre la plus épaisse), frangée à l’ouest par la périphérie des Monts Dôme (pays de Volvic et Pays brayaud), la Limagne d’Aigueperse et celle de Gannat (toutes deux en Limagne bourbonnaise). Églises, châteaux, maisons en pisé, gros bourgs fleurant bon la ruralité auvergnate, belvédères compensent son aspect peu spectaculaire. Au sud de Clermont, de petites vallées, des coulées volcaniques abritent prairies et vergers.
Au pied de la chaîne volcanique des Puys, Clermont-Ferrand, la capitale de l’Auvergne, est mariée au bibendum Michelin. Autres images: Blaise Pascal, le rugby, les rues tortueuses du Vieux Clermont, la noire austérité de la cathédrale, la place de Jaude…

La Limagne de Riom, frangée de coteaux calcaires à l’herbe rase, déploie de gras labours (maïs, tabac…) où s’intercalent des lambeaux d’anciens terroirs viticoles complantés d’arbres fruitiers et des villages. Des lignes de peupliers, saules, haies d’osier s’efforcent d’en rompre la monotonie. Sur la bordure des monts Dôme, la « montagne » riomoise s’épanouit, du pays de Volvic, dont la pierre de lave (l’andésite), très résistante, est exploitée depuis le Moyen Âge, au verdoyant Pays brayaud (entre Châtelguyon et Combronde).
Riom « le Beau », perchant ses demeures en pierres de lave sur une butte surveillant la Limagne, a su défendre son animation (industrie, artisanat, commerces, administrations, écoles) malgré la proximité Clermontoise. La « ville du barreau » rassemble une centaine d’édifices classés à l’intérieur de sa ceinture de boulevards remplaçant les remparts.

La Varenne de Lezoux, à l’est de la « vraie » Limagne, s’en singularise par son sol sableux, ses champs irréguliers, ses prairies, ses ilots boisés, des étangs poissonneux artificiels, des maisons dispersées aux murs de pisé et d’arkose, des églises au clocher carré, autant d’éléments qui lui assurent un cadre campagnard plaisant. Au nord, le plateau de Randan (Limagne bourbonnaise), couvert de forêts, forme la partie la plus haute des Varennes, dominant la plaine de la Dore, où les sols pauvres, sableux, acides, humides, font que les bois et les herbages prévalent sur les cultures.
Lezoux, gros centre de céramique à l’époque gallo-romaine, connaîtra la notoriété en Europe avec sa poterie sigillée, lisse ou décorée.

La Comté, entre Livradois et Limagne des buttes, s’ancre à un petit massif volcanique fort ancien, rappelant le Velay par ses pitons de lave déchaussés. Entaillée de vallées, cette Limagne bâtarde, où s’entremêlent courtes plaines et grosses buttes circulaires, se montre des plus pittoresques avec ses terroirs variés (herbages clos de haies vives, labours, vigne, arbres fruitiers), ses collines déjà méridionales, ses ruines perchées, ses taillis de chênes et ses panoramas.
Au milieu d’une plaine fertile, Vic-le-Comte est entourée d’un demi-cercle de puys.

La Limagne de Billom, au nord de la Comté, présente une douce harmonie de paysages, minutieusement agencés. Les sommets des Turluron livrent un aperçu de cette « Toscane auvergnate », marqueterie de prés, de champs (culture de l’ail), ponctués de calmes villages avec leur jolies églises.
Billom, fière de sa tradition scolaire et universitaire depuis douze siècles, est un centre commercial et artisanal.

La Limagne d’Issoire, au sud de la Grande Limagne (dont elle est séparée par le horst cristallin de Saint-Yvoine, entaillé par l’Allier) et de la Comté, forme une étroite et longue dépression, encadrée à l’est par les contreforts cristallins du Livradois et à l’ouest par des plateaux volcaniques. Accidentée de buttes volcaniques (cheminées, pitons), cette plaine d’Issoire compose un damier de cultures betteravières, céréalières (maïs, blé) et de prairies. Le lit de l’Allier, parfois large de 2 kilomètres, sinue entre les îles herbues (envahies lors des crues). « Capitale de l’aluminium », Issoire, dont l’abbatiale est l’un des plus extraordinaires spécimens de l’art roman auvergnat, disperse un frais dédale de ruelles dans sa ceinture de boulevards.

La Limagne du Lembron, accolée à la Limagne d’Issoire, est taillée dans des formations argileuses rougeâtres par la Couze d’Ardes, le Couzillou et le Lembronnet qui rejoignent les terrasses sableuses de l’Allier. Cette plaine de basse altitude, protégée des vents, manifeste de bonnes aptitudes agricoles (maïs, betterave, tournesol, colza, vignes des côtes de Boudes). Les bois recouvrent les coulées basaltiques. À l’ouest, entre le Cézallier et ces Petites Limagnes, le pays des Couzes est entaillé de gorges profondes aux versants boisés hérissés de rochers basaltiques. Roches cristallines (granit, gneiss), sédimentaires et volcaniques s’y conjuguent. Quelques vergers bien abrités, des vaches, des moutons, rappellent que jadis l’arboriculture (pêchers, pommiers, amandiers, cerisiers, vigne) faisait bon ménage avec la céréaliculture et l’élevage. Deux siècles d’exode rural ont miné cette société rurale.

1 Voir petit salé aux lentilles.

Auteur F. Zégierman, relecture Keldélice.

A propos du membre

Frédéric Zégierman Valence (26000)

Frédéric Zégierman a consacré sa vie à sillonner l'Hexagone pour aller chercher sur le terrain sa propre vision géo-ethnographique. Il est l'auteur de livres, de dossiers et d'articles pour magazines. Il réalise également des circuits atypiques pour les autocaristes. Le Guide des Pays de France (volumes Nord et Sud, publiés chez Fayard en 1999) est le premier ouvrage a avoir inventorié, étudié et cartographié l'ensemble de ces unités sous leurs divers aspects.

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