Retombée du Massif central sur la plaine rhodanienne et le gradin des garrigues, les Cévennes chevauchent trois départements, du massif de l’Aigoual au Tanargue, en une suite de blocs schisteux et granitiques : dédale de vallées ravinées, de rochers escarpés, de montagnes invincibles. Les rivières et les gardons (torrents), les hameaux et les pentes en terrasses, sculptées par la main de générations de paysans, strient ses paysages austères et orgueilleux. Ancrées solidement dans les villages montagnards, les maisons de schiste noir apparaissent conçues pour résister aux rigueurs climatiques.
Pays de “l’arbre à pain” (le châtaignier), les Cévennes alternent espaces sauvages et vallons tranquilles, où les couleurs chatoyantes de la végétation s’entremêlent. On peut diviser ce vaste territoire d’environ 3 000 kilomètres carrés en plusieurs ensembles, comprenant la région des Cévennes proprement dite, ainsi qu’une bordure sous-cévenole (de Ganges jusqu’au-delà d’Aubenas) : les Cévennes méridionales au sud, la haute Gardonnenque (la Cévenne des gardons) au centre, le Haut Pays à l’ouest, enfin, les Cévennes vivaroises au nord-est.
Gastronomie
Productions : charcuterie (jambon cru, jambonnette, saucisson sec, jésus, saucisse sèche dont saucisse d’Anduze, saucisse d’herbes lozérienne, maôche1, boudin aux herbes, pâté en croûte, fricandeau), viande de bœuf, de porc et d’agneau (agneau de Lozère), volailles (dont canard gras donnant foie gras et confit), gibier (sanglier, cerf, biche, chevreuil, lièvre, grive), truite, écrevisse, champignons (cèpe, griset, lactaire, pleurote), légumes (asperge, pomme de terre primeur, courgette, salade, oignons dont oignon doux des Cévennes, condiments et aromates (ail, herbes sauvages), fruits (châtaigne des Cévennes, pommes dont pomme reinette du Vigan, poire, abricot, pêche, nectarine et pavie, raisin de table, cerise, kiwi, melon, olive), fromages (pélardon, rogeret2, tomme de Lozère, rebarbe et foudjou3), confitures (dont celles de châtaigne, fraise des bois, airelle, myrtille, coing, griotte), miel des Cévennes, huile d’olive, vinaigre.
Boulangerie : fougasse aux fritons, fougasse aux grattons d’oie.
Spécialités : bajanat (soupe traditionnelle cévenole aux châtaignes), châtaignes grillées, soupe à l’orge perlé, œufs à la huguenote (cuits dans du jus de viande de mouton), tripes à l’alésienne, gigot à la gangeoise, agnolade, civet de sanglier, tarte au pélardon.
Desserts : tarte à la châtaigne, tourte cévenole aux reinettes, amellonnade de Florac (brioche aux amandes grillées), minerve, croquant, oreillettes4.
Boissons : jus de fruits (dont jus de pomme), sirops, muscat, cartagène, liqueurs.
Aux confins des Cévennes vivaroises : pastilles et eau minérale de Vals.
Les Cévennes méridionales offrent une remarquable diversité paysagère, liée au mélange des trois roches (granit, schiste, calcaire) et à l’influence climatique et culturelle de la Méditerranée. Elles s’étendent depuis la montagne de Lingas, à l’ouest, jusqu’aux campagnes de Saint-Hyppolyte et de Ganges. Le pays viganais, traversé par la profonde et sinueuse vallée de l’Arre, traduit la beauté de ces Cévennes du sud : pentes raides et terrasses cultivables, plateaux boisés, vallées sauvages ou encadrées de vergers, hameaux à flanc de coteaux ou nichés sur les replats, mas en schiste… Ces reliefs accidentés, couverts de maquis, de chênaies et de châtaigneraies ˗ remplacées en altitude par des résineux ˗, abritent un gibier abondant.
Le Haut Pays étend ses longues croupes granitiques du mont Lozère au nord au mont Aigoual au sud. Le mont Lozère (1 699 mètres), prolongement du massif cristallin de la Margeride, domine de sa masse chauve et de ses chaos rocheux les serres cévenoles. Sur le massif de l’Aigoual (de aqualis “le pluvieux”), la forêt côtoie la “pelouse” (pâturages d’altitude). Chaque année, à la fin du printemps, lorsque l’eau et l’herbe commencent à manquer dans les garrigues et les Cévennes méridionales, les drailles (chemins) s’emplissent pendant quelques jours d’une multitude de moutons montant vers l’estive, reprenant une transhumance trimillénaire. Tout ce Haut Pays cévenol abrite une faune luxuriante, des dizaines d’espèces de mammifères (cerf, biche, chevreuil, mouflon…), plus d’une centaine d’espèces d’oiseaux, des reptiles, des batraciens, des insectes, sans compter les poissons qui font le bonheur des pêcheurs.
Bien qu’excentrée au sud-est, aux confins des garrigues de Nîmes, Alès, ville minière, est l’agglomération majeure des Cévennes.
Les Cévennes vivaroises, incluses essentiellement dans le département de l’Ardèche (et donc dans la région Rhône-Alpes), forment un pays de serres schisteuses de 1 000 à 1 500 mètres d’altitude, déchiquetées et ravinées par les pluies, séparées par des vallées très encaissées où les paysans d’antan on édifié d’extraordinaires terrasses pour les cultiver. Ici règne encore le châtaignier, prééminence qu’il partageait autrefois avec le mûrier pour l’élevage du ver à soie.
Elle aussi très excentrée, Aubenas est la ville principale de ces Cévennes de l’Ardèche.
1 Grosse saucisse courbe, de couleur rosâtre tachetée de vert, faite de chair à saucisse, de poitrine, d’épaule et de gras de porc, de chou ou de blettes embossés dans un chaudin de porc, et cuite longuement à l’eau. Détails supplémentaire, voir maouche, en région Rhône-Alpes.
2 Proche du pélardon, produit dans les Cévennes ardéchoises et dans le Vivarais (vers Lamastre).
3 Voir à fromage fort (région Rhône-Alpes).
4 Oreillette, voir à région PACA.
Auteur F. Zégierman, relecture Keldélice.
A propos du membre
Frédéric Zégierman
Valence (26000)
Frédéric Zégierman a consacré sa vie à sillonner l'Hexagone pour aller chercher sur le terrain sa propre vision géo-ethnographique. Il est l'auteur de livres, de dossiers et d'articles pour magazines. Il réalise également des circuits atypiques pour les autocaristes. Le Guide des Pays de France (volumes Nord et Sud, publiés chez Fayard en 1999) est le premier ouvrage a avoir inventorié, étudié et cartographié l'ensemble de ces unités sous leurs divers aspects.
