Description
Le marron dit « de Redon » englobe plusieurs variétés de châtaignes 1 et de marrons sélectionnés d’après leur calibre (moyen à gros) et leur bonne qualité gustative. Outre la châtaigne commune, les variétés les plus représentatives sont la saint-jean (du nom d’un village aux châtaigneraies jadis réputées), dite aussi jaunette, la persillaude, la précoce de Maure (Maure-de-Bretagne), le cruaud (un gros marron sucré), le gros poil (un marron petit format), auxquelles se rajoutent de nouveaux hybrides, issus de greffages, d’une belle grosseur ronde et foncée, introduits dans les châtaigneraies dans les années 1970 comme la belle-épine, la bournette, la bétizac etc. Ces variétés, précoces ou mi-tardives, « lâchent » leurs fruits de septembre à octobre.
La zone de production se concentre dans un rayon d’une trentaine de kilomètres autour de Redon, s’étendant jusqu’aux confins du bassin de Rennes. Cette production est écoulée en gros chez les revendeurs et les grilleurs, ou en filets chez les détaillants et les restaurateurs. A noter que l’on trouve aussi du marron et de la châtaigne dans les marches bretonnes de Fougères et de Vitré.
Les marrons, fort appréciés dans la région redonnaise, se muent en garniture délicate pour une volaille ou nombre de spécialités élaborées par des chefs cuisiniers (terrine de volaille aux marrons) ou des artisans pâtissiers (sablé fourré à la crème de marron). A la maison, on les consomme en potage, ou simplement bouillis et arrosés de lait ribot. Mais les connaisseurs les préfèrent grillés, avec un morceau de beurre et une bolée de cidre !
En Bretagne, plus précisément en pays de Vilaine (pays de Redon), comme dans d’autres régions françaises2 pourvues de sols siliceux indispensables à sa culture, le châtaignier (« l’arbre à pain ») constitua la base de l’alimentation de générations de paysans. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, la récolte totale de marron, pour toute la Bretagne, avoisinait les 15 000 tonnes. Celle-ci sera divisée par dix en l’espace de 50 ans, dépassant à peine les 1600 tonnes à l’aube de la seconde guerre mondiale. Ce déclin résulte de la généralisation de la pomme de terre, autant que de la maladie de l’encre qui décima les vergers de châtaigniers à partir de 1890. Toutefois, la production reste suffisante pour entretenir des marchés et foires aux marrons actifs, telle la foire Teillouse (nom de Redon sous la Révolution), tombée en désuétude à la fin des années cinquante, qui réunissait les marchands au mois d’octobre.
Depuis les années 1980, la châtaigne bretonne connaît un regain d’intérêt, sous l’impulsion d’une Confrérie du Marron de Redon. La foire Teillouse, remise au goût du jour, se conclut par une manifestation culturelle, la Bogue d’or (chant, musique, conte). Le dernier week-end d’octobre, Redon attire donc tout ce que la région compte de producteurs, venus vendre leur récolte, mais aussi les artisans des métiers de bouche qui proposent leurs créations autour du marron.
1 La châtaigne est un fruit cloisonné comportant 2 à 5 graines. On appelle marrons certaines châtaignes à fruits non cloisonnés comportant une seule graine.
2 Outre le pays de Redon breton, voici les autres « grands » pays de la châtaigne en France : Civraisien (Poitou-Charentes), Châtaigneraie (région Auvergne), Cévennes (Languedoc-Roussillon), Bas Vivarais (Rhône-Alpes), Castagniccia (Corse). Egalement : pays de la Châtaigne, dans le Bocage bourbonnais (Auvergne).
Auteur F. Zégierman, relecture Keldélice.
A propos du membre
Frédéric Zégierman
Valence (26000)
Frédéric Zégierman a consacré sa vie à sillonner l'Hexagone pour aller chercher sur le terrain sa propre vision géo-ethnographique. Il est l'auteur de livres, de dossiers et d'articles pour magazines. Il réalise également des circuits atypiques pour les autocaristes. Le Guide des Pays de France (volumes Nord et Sud, publiés chez Fayard en 1999) est le premier ouvrage a avoir inventorié, étudié et cartographié l'ensemble de ces unités sous leurs divers aspects.
